Comme on l’a dit lors de l’article précèdent : Sommeil2 – Organisation du sommeil : Les rythmes biologiques, le sommeil est une suite active et organisée d’événements et d’états physiologiques. Il fait suite à une phase d’éveil et se compose de deux formes d’états faciles à distinguer : le sommeil lent et le sommeil paradoxal. Approfondissons tout cela…
Organisation du sommeil : Le cycle du sommeil
En phase d’éveil :
Chez l’homme cet état représente environ les deux tiers de son temps. Au niveau comportemental, on peut distinguer différents types d’éveil :
- actif (activité locomotrice),
- cognitif (activité mentale) ou calme.
Le cerveau et le corps sont en activité constante. Les muscles du corps sont sollicités pour marcher ou faire du sport, taper à l’ordinateur, ouvrir une porte ou tenir un sac et leurs contractions nécessitent de l’énergie produite tout au long de la journée par les cellules. Le cerveau est, lui aussi, actif en permanence… vigilance, concentration.
Durant l’éveil, l’activité neuronale est maintenue grâce à des stimulations provenant de l’environnement extérieur comme la lumière ou des stimulations internes, comme la sécrétion de certaines molécules, permettent aussi de maintenir l’éveil (ex dopamine, sérotonine).
Le Diagramme (hypnogramme) représente l’activité cérébrale avec les phases successives de sommeil lent 1 à 4, et de sommeil paradoxal que nous détaillons ci-dessous :
LE SOMMEIL LENT
Il existe 4 stades distincts du sommeil lent. Il est bien évident que le glissement vers un sommeil de plus en plus profond au début de la nuit se fait progressivement, mais ces stades constituent des repères pratiques pour décrire le niveau de profondeur du sommeil lent.
Le stade 1 du sommeil lent :
Correspond à la transition entre la veille et le sommeil. Apparaît quand on s’allonge et ferme les yeux. C’est une sorte de somnolence semi-consciente, où les pensées vagabondent. La respiration ralentit, tout comme le rythme cardiaque. Quelques brusques contractions musculaires des jambes annoncent alors le relâchement des muscles bien que le tonus musculaire soit toujours là. Les yeux font des mouvements lents, sous les paupières closes.
Le début de l’endormissement est marqué par une baisse de fréquence de l’EEG (Electro encéphalogramme). La bascule du rythme Bêta de l’éveil vers le rythme Alpha plus lent… puis, des ondes Thêta, encore plus lentes, commencent à apparaître. Cette descente peut être entrecoupée de « pics » d’ondes alpha (associées à l’éveil).
Résultat : le moindre bruit peut nous réveiller, et on a alors l’impression que l’on n’était pas endormi. Des rêves courts ou des pensées errantes sont aussi souvent rapportés durant ce stade.
La durée moyenne d’endormissement est d’environ 20 minutes : On parle de latence d’endormissement. Cette durée peut paraître longue lorsque l’on est couché dans le noir et inquiet de savoir si le sommeil va ou non venir. Elle varie selon les individus, le degré de fatigue, l’exposition à des stimuli dans la période qui a précédé le sommeil.
La moindre stimulation peut l’annuler et ramener la personne à un état d’éveil immédiat et lucide.
Cette phase permet de mettre en route les mécanismes biochimiques et physiologiques d’entraînement du sommeil.
Il est recommandé de se lever si l’on n’est pas endormi après 20 minutes, de changer de pièce ou de s’éloigner un peu du lit sans pour autant se soumettre à des activités qui vont stimuler votre cerveau comme regarder la télévision, ouvrir votre ordinateur ou votre téléphone portable. Dès que les signes de somnolence réapparaissent, ne pas tarder à retourner se coucher.
Les signes de somnolence
- Paupières de plus en plus lourdes.
- Bâillements intempestifs.
- Impression de flou visuel.
- Raideur de la nuque ou du dos.
- Fourmillements dans les jambes.
- Envie incessante de bouger.
Le stade 2 du sommeil lent :
Le stade II est celui d’un sommeil léger mais lent. Il succède à l’endormissement. On assiste à une nouvelle baisse de fréquence de l’EEG et à un accroissement de son amplitude. Les ondes Thêta sont caractéristiques de ce stade. On peut aussi observer durant ce stade une onde dite complexe K qui semble associée à de brefs réveils souvent en réponse à des stimuli externes (réveils très courts, moins de trois minutes, souvent inconscients).
C’est le stade où l’adulte passe le plus de temps, soit près de 50% du temps de sommeil d’une nuit. A ce stade, le tonus musculaire n’est pas effacé, les grandes fonctions végétatives telles que circulation et respiration sont régulières bien que ralenties, ou plutôt apaisées.
Ce type de sommeil occupe avec l’endormissement environ le premier tiers de la durée du cycle. Ce stade est instable, passage obligé de l’éveil à tous les stades du sommeil, il gère de multiples allers retours consécutifs aux circonstances du sommeil, aux activités physiques, à la santé, à l’humeur, à l’âge et au stress.
Les personnes âgées quittent rarement le stade II qui représente l’essentiel de leur nuit.
Le stade 3 du sommeil lent :
Marque le passage à un sommeil profond. Les ondes Delta font leur apparition et constituent bientôt près de la moitié de ce que l’on observe sur l’EEG. Les complexes K s’observent encore, mais moins souvent qu’au stade 2 et de manière générale il n’y a plus à ce stade de réveil cause stimuli extérieur. Cette étape dure environ 10 mn.
Le stade 4 du sommeil lent :
Niveau le plus profond du sommeil, là où l’on dort « le plus profondément ». Les ondes Delta dominent le tracé de l’EEG et l’activité neuronale est globalement à son plus bas. La température du cerveau est aussi à son plus bas et la respiration, le rythme cardiaque et la pression sanguine sont ralentis par l’influence du système parasympathique.
Durant ce stade qui dure environ 35 à 40 minutes chez l’adulte lors de sa première apparition en début de nuit (15% à 20% du temps total de sommeil chez le jeune adulte), les muscles ont toujours leur tonus et des mouvements des bras, des jambes et du torse sont possibles. C’est en réalité une étape importante et très active du sommeil qui répare, régénère et construit. Ce sommeil efface les fatigues, réhabilite les fonctions et redistribue l’énergie.
Il est essentiel chez l’enfant: il recouvre en partie la période de sécrétion de l’hormone de croissance.
C’est l’étape où il est le plus difficile de réveiller le dormeur. C’est également durant ce stade que l’on peut observer les épisodes de somnambulisme et de terreur nocturne chez les enfants.
LE SOMMEIL PARADOXAL
Le sommeil paradoxal a été nommé ainsi par le Pr Michel Jouvet car ce stade associe un EEG rapide, désynchronisé, similaire de celui de l’éveil.
Ce stade de sommeil est profond, le réveil nécessite des stimuli importants et s’accompagne de souvenir de rêves. C’est pourquoi on l’associe aux rêves. Cependant, le sommeil paradoxal n’est pas nécessaire pour rêver. Cette distinction entre le rêve, qui est un état subjectif, et le sommeil paradoxal, qui est un état du cerveau, est fondamentale. Autrement dit, le rêve est un phénomène ne pouvant être décrit que qualitativement alors que le sommeil paradoxal peut faire l’objet de mesures physiologiques précises, notamment sur le tracé de son EEG.
Ce stade est caractérisé divers phénomènes :
- un EEG rapide, de bas voltage, riche en ondes thêta
- une atonie musculaire complète – corps inerte
- une augmentation de la température cérébrale
- des phénomènes phasiques apparaissant de manière transitoire et discontinue : secousses musculaires des extrémités et de la face, mouvements oculaires rapides, érections péniennes.
- Durant le sommeil paradoxal, la consommation d’oxygène du cerveau, qui reflète sa consommation d’énergie, est très élevée, et même supérieure à celle du même cerveau éveillé qui réfléchit à un problème cognitif complexe.
Sommeil paradoxal et âge :
Le sommeil paradoxal apparaît au cours de la maturation du système nerveux central, au voisinage de la naissance. Chez le nouveau-né, il devient caractéristique vers 3 ou 4 mois. Le nourrisson s’endort directement en phase de sommeil paradoxal, qui représente 50 à 80% de son temps de sommeil. Puis le pourcentage de sommeil paradoxal diminue et se stabilise à 20% du temps de sommeil chez l’adulte.
En résumé : Cycle du sommeil
Une nuit de sommeil va donc être une succession de cycle 3 à 6 récurrents qui durent environ 1h30 à 2h, chaque cycle étant composé de phases de sommeil lent et paradoxal s’enchainant et séparés par une phase intermédiaire pouvant conduire au réveil.
L’hypnogramme permet de voir cet enchainement de cycles et nous montre aussi que le sommeil lent profond (stades 3 et 4) est plus prononcé en début de nuit. C’est ce qui explique les grandes vertus de récupération physique associées aux premières heures de sommeil. En fin de nuit, le schéma s’inverse et c’est le sommeil paradoxal qui devient prédominant.
En proportion le sommeil lent léger représente 60% du temps de sommeil total, le sommeil lent profond est présent durant 20% de la nuit tout comme le stade du sommeil paradoxal.
La durée du sommeil paradoxal des personnes âgées décline pour tourner autour de 15% de leur temps de sommeil. Le sommeil le plus profond (stade 4) diminue aussi progressivement avec l’âge, contribuant à rendre le sommeil plus sensible aux perturbations de toute sorte. Étant donné l’importance du sommeil lent pour le système immunitaire, il se pourrait bien que la diminution de celui-ci rende aussi plus vulnérable aux maladies.